Monsieur le ministre, lors de la séance plénière du 29 janvier dernier, j’ai interpellé le premier ministre afin de savoir ce que le gouvernement prévoyait à l’échelon national et européen pour lutter contre l’augmentation inquiétante des actes antisémites. Il m’a répondu que ce serait « la tolérance zéro, que chaque acte devait faire l’objet d’une plainte et que chaque plainte devait faire l’objet d’un suivi ». Certes, il est question d’antisémitisme, mais cette tolérance zéro doit être d’application pour toute infraction à la loi de 1981, c’est une évidence!

Mon parti, le MR, conduit actuellement les assises de l’interculturalité, au sein desquelles nous recevons les représentants de chaque communauté philosophique. Les représentants de la communauté juive nous y ont confié que, dans bien des cas, les victimes d’actes antisémites ne portaient pas plainte, estimant que cela ne servait à rien.

Pouvez-vous nous indiquer combien de plaintes ont-elles été déposées pour antisémitisme l’année dernière et combien d’entre elles ont-elles fait ou font-elles l’objet de poursuites actuellement?
Il importe que les victimes d’antisémitisme retrouvent confiance en la justice belge. Pour ce faire, un travail de sensibilisation doit être entamé d’urgence, à commencer par les ministères et les forces de police qui actent les plaintes.

Par ailleurs, ne serait-il pas opportun d’édicter une circulaire ministérielle ou du Collège des procureurs généraux, qui préciserait la conduite à adopter sur le terrain dans le cadre de cette « tolérance zéro » contre toutes les infractions de ce type et contre l’antisémitisme en particulier?

Koen Geens, ministre de la Justice

Monsieur le président, chère collègue, comme j’ai déjà eu l’occasion de le préciser, le Collège des procureurs généraux ne peut fournir de statistiques en réponse à des questions parlementaires orales, étant donné la brièveté du délai de réponse. En l’occurrence, le Collège relève que le ministère public ne dispose pas d’un outil informatique lui permettant dans un aussi bref délai de répondre à ce type de questions.

Les analystes doivent en effet concevoir une formule d’extraction des données informatiques pertinentes pour envisager ensuite de valider les résultats obtenus, ce qui ne peut être réalisé dans un aussi court laps de temps, à tout le moins dans l’état actuel des moyens matériels et humains dont dispose le ministère public.

Ceci n’enlève rien à la justesse de vos observations quant à l’importance à accorder à tout acte xénophobe ou antisémite. À cet égard, une circulaire commune du ministre de la Justice, du ministre de l’Intérieur et du Collège des procureurs généraux se rapportant à la politique de recherche et de poursuite en matière de discrimination et de délits de haine a été adoptée le 13 juin 2013. Il s’agit d’un texte ambitieux qui tente de sensibiliser tant les services de police que les parquets aux problématiques de discrimination, notamment lorsqu’elles se basent sur le racisme, l’antisémitisme ou la xénophobie.

Sans détailler cette longue circulaire, j’y relève qu’un magistrat de référence en matière de discrimination et de délits de haine est désigné au sein de chaque parquet, auditorat ou parquet et auditorat général qui assure pour cette matière la coordination, l’information et la sensibilisation des magistrats, services de police, etc. Il en est de même au sein de la police fédérale et de chaque police locale.

Cette circulaire prévoit que lorsque le parquet est saisi de faits de cette nature pour lesquels des preuves ont été réunies, il y aura toujours de sa part une réaction dont la forme dépendra de la gravité des faits commis. La réaction peut prendre la forme d’un rappel à la loi (la probation prétorienne), d’une médiation pénale, d’une transaction, d’une citation devant le tribunal correctionnel. Le Collège des procureurs généraux poursuit le travail d’information, de formation et de sensibilisation des acteurs de terrain à ces matières.

Réplique de Sophie Wilmès :

Monsieur le ministre, je vous remercie pour cette réponse.

Je comprends qu’il est difficile d’extraire les données chiffrées en un laps de temps si court. Je comprends aussi que la possibilité existe. J’essaierai d’obtenir ces données d’une autre manière car elles permettront d’objectiver l’augmentation des actes rapportés et leur suivi. Si une circulaire a été éditée en 2013, je ne manquerai pas de la relayer auprès de la population.